Comparaison entre la démarche qualité « fonctionnelle » et la démarche « normative »

Comparaison entre la démarche qualité « fonctionnelle » et la démarche « normative »

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FICHE PRATIQUE

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Vues de loin, les démarches fonctionnelles et les démarches « normatives » habituelles apparaissent similaires : les deux aboutissent à la conformité à la norme, à la formalisation des différents processus et… au certificat.

Pourtant, dans la pratique, elles sont très différentes à la fois dans leur déroulement, leurs résultats concrets et l’état d’esprit créé dans l’entreprise.

Approfondissons…

Nota : cette fiche est directement transposable aux démarches environnementales, de développement durable, hygiène et sécurité… et plus généralement à toutes les démarches qui reposent sur des évolutions de comportement.

Le déroulement des deux démarches

La démarche « normative » est centrée sur la conformité au référentiel ou au modèle : elle commence par analyser les écarts par rapport à celui-ci, qui consistent généralement surtout dans des processus ou aspects non formalisés, exemples : définition des fonctions, description des processus…

L’étape suivante consiste à écrire ces compléments. On obtient alors des améliorations ponctuelles grâce à la clarification du fonctionnement ainsi obtenue.

Par la suite, le comité qualité, les audits, l’action du responsable qualité… restent centrés sur la conformité aux procédures et sur la gestion de celles-ci.

La démarche « fonctionnelle » part à l’inverse des problèmes de fonctionnement de l’organisme via un diagnostic participatif qui les identifie ainsi que leurs solutions possibles, à partir des suggestions des personnels, sans référence aucune au référentiel. Ces dysfonctionnements peuvent être dans le champ du référentiel ou non, par exemple concerner la gestion, la prospection, etc… (en restant toutefois dans le domaine de l’organisation, sans entrer dans le social ou les investissements). On ne fait également pas de distinction entre qualité, organisation, sécurité, environnement… Toutes les améliorations sont bonnes à prendre…

L’étape suivante est la mise en place des solutions, en participation étroite avec les acteurs (c’est eux qui font…). La méthodologie de base est le « Kaizen », c’est-à-dire toutes les améliorations utiles, petites ou grosses, de façon libre.

Si dans le cas précédent, l’animateur doit être un qualiticien formé aux normes, pour la démarche fonctionnelle il vaut mieux un bon professionnel de terrain aimant l’organisation et le travail en équipe, avec un accompagnement extérieur par un consultant « fonctionnel ».

On examine seulement ensuite comment intégrer les exigences du référentiel dans les documents rédigés, sachant que le consultant a préparé le terrain sans le dire. Il s’agit généralement simplement d’ajustements formels.

Par la suite, le comité qualité, les audits internes, les indicateurs… restent ciblés sur les performances de l’entreprise (ventes, profit, efficacité interne, motivation du personnel…).

Comparaison du déroulement des deux démarches
Démarche « normative » classique, axée sur la conformité au référentiel Démarche fonctionnelle, axée sur l’amélioration de l’entreprise
Diagnostic initial des écarts par rapport au référentiel Diagnostic initial des améliorations possibles du fonctionnement de l’organisme et des solutions souhaitées par les personnels et la direction
Plan de travail centré sur la formalisation de l’organisation et des processus, conformément aux demandes du  référentiel Plan de travail centré sur les améliorations précédentes, en dehors de toute référence au référentiel. L’animateur s’assure seulement et de façon sous-jacente de la convergence  des actions vers le référentiel,.
Ensuite fonctionnement du « système de management qualité » centré sur la conformité et la gestion des procédures. Ensuite fonctionnement de la « démarche qualité » centré sur le traitement des problèmes qui perturbent le fonctionnement et l’efficacité de l’entreprise, avec le suivi de ses performances : Chiffre d’affaires, marge, efficacité interne, motivation…
Audits internes de conformité aux procédures et au référentiel Audits d’amélioration sur les problèmes de fonctionnement détectés

Les résultats sont très différents

D’abord au niveau des états d’esprit :

Dans la démarche « classique », le fait de tout centrer initialement sur la norme et la formalisation donne dès départ une image de formalisme et de faible utilité pratique, ce qui crée une faible adhésion qui sera difficile à lever ensuite. Le personnel ne peut comprendre (et il a raison) que l’on passe tant de temps à décrire les processus sans résoudre les dysfonctionnements.

L’amélioration est en outre ensuite difficile car les dysfonctionnements n’ont pas été clairement identifiés au préalable et les décisions de direction n’ont pas été prises au début, d’autant plus que ces dysfonctionnements sont souvent complexes et  impliquent de nombreux services.

La conséquence en est généralement un désintérêt des services et le responsable qualité doit souvent mener la démarche avec très peu d’appui, y compris de la part de la direction.

En commençant par améliorer concrètement, la démarche fonctionnelle prouve tout de suite son intérêt et sa plus-value. Elle intéresse ainsi beaucoup plus les services.

Caractérisant clairement dés le début les améliorations à apporter, le diagnostic permet ensuite une amélioration rapide et visible. Le responsable qualité est  ressenti comme utile et trouve une place reconnue dans l’entreprise.

Autre différence essentielle : la démarche « classique » est taylorienne : on fixe des objectifs, puis des procédures et les personnels doivent suivre strictement ces procédures, ce qui est vérifié par des contrôles, des indicateurs, des audits… Le tout est contraignant et rigidifiant.

Dans la démarche fonctionnelle, on s’axe sur les objectifs et on  « donne envie » de bien travailler et d’améliorer. La psychologie joue un grand rôle. C’est une démarche plus mobilisatrice, ouverte et dynamisante.

Au niveau documentaire :

Dans la démarche « normative », les procédures sont descriptives et sont peu utiles aux personnels. Elles sont donc peu utilisées et dorment dans les tiroirs.

Dans la démarche fonctionnelle, les documents sont rédigés en fonction des besoins des acteurs et sont jugés à leur utilité pratique. On retrouve donc bien les mêmes processus, mais avec une documentation très différente.

Le rôle du responsable qualité

Dans la démarche traditionnelle, les autres services s’impliquent peu et le responsable qualité s’adonne essentiellement à la gestion documentaire.

Dans la démarche fonctionnelle, l’action de suivi et d’amélioration est partagée entre tous les services, le responsable qualité ayant seulement un rôle d’animation centrale, en liaison avec la direction. Il est d’ailleurs souhaitable qu’il ne fasse ce travail qu’à temps partiel et cumule avec une autre fonction.

Les indicateurs qualité

La démarche « normative » suit des indicateurs « qualité » spécifiques, souvent peu importants et sans relation directe avec les objectifs opérationnels de l’entreprise.

Dans la démarche fonctionnelle, on suit directement les indicateurs opérationnels, à l’unisson avec les autres services, et on travaille ce qui nuit aux performances et à l’efficacité, en complément des actions « opérationnelles » des autres services.

Il y a donc complète cohérence et complémentarité entre l’action qualité et celle des autres secteurs.

Les résultats finaux

Dans la démarche classique, les résultats sont essentiellement le certificat et une clarification de l’organisation, toutefois sans beaucoup d’améliorations, avec peu de progression du chiffre d’affaires.

Dans la démarche fonctionnelle, le chiffre d’affaires progresse souvent fortement (voir les exemples), le fonctionnement s’améliore fortement ainsi que la mobilisation du personnel et l’ambiance de travail..

Comparaison des résultats
Démarche « normative » classique, axée sur la conformité au référentiel Démarche fonctionnelle, axée sur l’amélioration de l’entreprise
Surtout formalisation du fonctionnement, avec une clarification de l’organisation mais des améliorations opérationnelles limitées. Des améliorations rapides et nettes des performances et de l’efficacité : chiffre d’affaires, marge, efficacité, satisfaction des clients…
Une démarche taylorienne, basée sur le respect des procédures. Une démarche mobilisatrice, qui cherche à renforcer l’envie de bien faire et de progresser.
Un certain rejet par les services et la direction, le responsable qualité se trouve isolé Une prise en charge de la démarche par les services, le responsable qualité étant l’animateur central et trouvant une place utile et reconnue
Des documents descriptifs peu utiles Des documents-outils répondant aux besoins des personnels
Une faible cohérence entre l’action qualité et celle des autres services. Une complémentarité et une cohérence parfaites entre l’action qualité et celle des autres services.

Et le certificat ?

On pourrait croire que la certification est plus facile à obtenir par la démarche de conformité. C’était le cas aux tous débuts, lorsque les auditeurs étaient peu expérimentés et regardaient avant tout la conformité formelle. Ils sont toutefois tout à fait capable de distinguer aujourd’hui entre la démarche artificielle et « plaquée » à laquelle conduit la démarche de conformité et celle, bien assimilée et bien vécue par tous, de la démarche fonctionnelle, même si quelques non-conformités formelles sont constatées de ci de là.

Il faut en particulier dédramatiser les remarques des auditeurs : si elles sont justifiées, elles sont utiles et « rentabilisent » l’audit, sinon il faut argumenter vis-à-vis de l’auditeur et, s’il s’entête, les appliquer à minima. L’erreur est de viser le « 0 écart ». On part alors inévitablement vers la démarche de conformité et les excès de formalisme.

Alors, faut-il le certificat en démarche fonctionnelle ?

Oui car cela donne un objectif mobilisateur. Et la norme ISO 9001 est la mieux adaptée car elle est la plus flexible. Il faut toutefois l’appliquer de façon « fonctionnelle », c’est-à-dire dans son esprit et non à la lettre (voir guide).

Menée par la méthode fonctionnelle, la certification permet alors une véritable cure de jouvence pour l’entreprise, en améliorant un grand nombre de petits et grands défauts de fonctionnement qui la handicapent, mécontentent les clients et démotivent le personnel.

Par ailleurs, bien soutenue en interne, la démarche fonctionnelle est plus rapide et moins coûteuse que la démarche de conformité.

Voir aussi :

Le guide de mise en oeuvre de la norme ISO 9001 par la démarche fonctionnelle

Les 8 clefs de la réussite de la démarche fonctionnelle

Ainsi que les différents articles et fiches pratiques du site

[1]       Vous trouverez plus de détails dans le livre « Certification qualité utile, sortir du formalisme, recentrer la qualité sur le développement de l’entreprise ». A lire absolument !

Par Christian DOUCET

Merci de citer l’auteur dans le cas d’une utilisation de la fiche

2017-03-21T20:23:27+00:00